Sceau de Franchimont










« Le plus grand homme de la Révolution n’a pas encore en France sa statue : c’est un monument expiatoire qu’il faudrait ! Il ne s’est pas trouvé un seul gouvernement républicain pour oser revendiquer sa mémoire. Plus clairvoyante, la haine des ennemis de la République n’a jamais désarmé. J’ai toujours pensé que la grandeur exceptionnelle est désignée à l’avenir par le flair acharné de l’ennemi, bien avant que les amis ne l’aient reconnue.»

Romain ROLLAND, Robespierre



Déclaration de principe (la nôtre)

Ce 6 mai 2008, 250ème anniversaire de la naissance de Maximilien Robespierre, ne pouvant douter que la France allait esquiver comme la peste son devoir d’honorer le plus grand homme d’état qu’elle eut jamais, et bien assurés que « l’année Robespierre » n’allait pas être une autre « année Mozart », nous, citoyens tout à fait quelconques d’un pays voisin, avons décidé de le faire à sa place. Avec les moyens du bord et nos compétences informatiques nulles, en téméraires autodidactes. Qu’on veuille bien nous le pardonner.
« Robespierre ou la Mort » est le lieu où nous entendons reconnaître notre énorme dette, à défaut de la payer. Nous l’avons appelé ainsi, parce qu’il était impossible de dire en moins de mots notre conviction que toute voie humaine autre que celle ouverte par l’Incorruptible est et sera sans issue : voie de garage, cul-de-sac ! Notre conviction plus forte encore est que l’alternative n’en est déjà plus une : ce sera la mort. Ou pire, si nous n’arrivons pas à éviter le sort contre lequel ce prophète méprisé de T. H. White nous a mis en garde avec tant d’angoisse dans son Livre de Merlin : celui des fourmis (fascisme absolu et définitif ; quarante millions d’années sans évolution). L’extinction serait préférable ; au moins laisserait-elle une chance aux autres espèces. Mais n’est-ce pas là notre pessimisme de vieillards qui parle, ou notre paranoïa ? Et Herr Sigmund n’est plus là pour y voir clair à notre place. Qui peut ignorer aussi que celui qui va mourir tend à percevoir sa propre fin comme une fin cosmique ? Certainement pas Pier Paolo Pasolini, lucide entre les lucides.
Quoi qu’il en soit...
Nous parlions de célébration.
Il se trouve que ce – faste ! – mois de mai 2008 ne marque pas seulement le 250ème anniversaire de naissance de Robespierre, mais aussi le 265ème anniversaire de naissance de deux autres grands révolutionnaires : Marat et Toussaint Louverture. Nous trouvons qu’il n’est que juste et naturel d’associer les uns à l’hommage reconnaissant que nous rendons à l’autre. « Robespierre ou la Mort » sera donc, comme dans la réalité, « Robespierre, Toussaint et Marat ou la Mort ». Personne de bonne foi, en effet, n’osera nier que chacun de ces trois hommes ait été, d’une manière ou d’une autre, le premier d’entre les siens. Intrépides créateurs de quelque chose qui n’avait jamais existé avant eux – une société fondée sur l’égalité – ils ont creusé la brèche que devait – qu’aurait dû – élargir la fraternité. S’il advient que notre XXIe siècle ait le triste privilège d’abolir à jamais cette utopie, ce ne sera pas leur faute mais la nôtre.
Furent-ils les seuls à mettre leur vie dans la balance, pour la faire pencher du côté d’un futur moins glauque et désespérant pour l’humanité ? Sûrement pas. Et quoi qu’il soit fort mal vu de le rappeler, ils ont été nombreux ceux qui les ont accompagnés dans la vie et, pour certains, dans la mort, sans parler de ceux qui ont inlassablement poursuivi leur oeuvre après la défaite. Ceux-là aussi doivent tout naturellement trouver leur place ici. De leur nombre, quantité de Belges, illustres inconnus ou méconnus pour l’histoire officielle de leur pays, comment la France les connaîtrait-elle ? Mais Maximilien Robespierre, lui, les a connus. Et non seulement il les a connus, mais il les a, à l’occasion, fréquentés, leur a plus d’une fois témoigné attentive considération, pour ne rien dire (mais nous le dirons) de ceux auxquels il a sauvé la vie et de celui qui est monté avec lui sur l’échafaud.
La Révolution Liégeoise (août 1789) avait commencé dès 1788 au Marquisat de Franchimont, petite enclave ardennaise dans cette république épiscopale qui aura duré près de mille ans. Et ce minuscule marquisat (cinq bans, dont une seule « Bonne Ville », Verviers) représente, à l’échelle du XVIIIe siècle et du continent, une expérience qui pourrait se comparer à celle de Cuba de nos jours. (Hâtons-nous de souhaiter aux Cubains une issue plus heureuse.) Il devrait donc en être aussi question sur ce site. Soyons clairs : les mots « devoir de mémoire » nous donnent de l’urticaire, comme tous les slogans fétiches de l’effrontée association de malfaiteurs dominante. Mais « devoir d’instruire » s’impose, dès lors que les Éducations Nationales, non seulement ont failli au leur, mais ont été transmuées sans vergogne en instruments de la lobotomisation générale. Nous ne pouvons pas – c’est contraire à nos principes – forcer quiconque à s’instruire des vérités historiques fondamentales. Nous pouvons en revanche faire en sorte que le chemin de cette vérité soit au moins indiqué à ceux qui auront la curiosité de s’y engager.
Amen.